Kinshasa, le 08 février 2013 (caritasdev.cd) : L’Evêque du diocèse de Bondo, dans le Nord-est de la République Démocratique du Congo (RDC), lance un SOS face à la situation sécuritaire et humanitaire qui prévaut dans le Territoire d’Ango, District du Bas-Uélé en Province Orientale. Cette situation sécuritaire et humanitaire est marquée par des méfaits que causent aux populations congolaises la rébellion ougandaise de la LRA et les éleveurs « Mbororo ».
Mgr Etienne UNG’EYOWUN a rendu publique une déclaration à ce sujet, à lire in extenso ci-dessous. L’Evêque affirme ce qui suit dans sa déclaration : « Du 15 janvier au 01er février 2013 j’ai été en visite pastorale dans le territoire d’Ango (Api, Ango, Dakwa). J’ai rencontré et écouté la population locale qui a fortement besoin de la sécurité et remercie la communauté humanitaire pour son assistance », rapporte caritasdev.cd.
« Situation sécuritaire et humanitaire dans le territoire d’Ango au diocèse de Bondo
Du 15 janvier au 1er février 2013, j’ai été en visite pastorale dans le Territoire d’Ango (Api, Ango, Dakwa). J’ai rencontré et écouté la population locale qui a fortement besoin de la sécurité et remercie la communauté humanitaire pour son assistance.
- Les causes d’insécurité Le Territoire d’Ango est limité à l’est par celui de Dungu où existent plusieurs groupuscules des rebelles ougandais de la « Lord’s Resistance Army » (LRA) de Joseph Kony. Ces derniers commettent plusieurs exactions dans le Territoire de Dungu et débordent souvent celui d’Ango par Nagoda, Banda ou les autres localités. En octobre 2012, ils se sont signalés à Pasi vers la frontière avec la République Centrafricaine où ils ont pillé la phonie d’ « Invisible Children ». Après un moment d’accalmie, ils ont fait irruption au sud de la rivière Api avec l’assassinat de 7 pécheurs partis de Dakwa. Le lieu de cet assassinat étant inaccessible, les détails ne sont pas disponibles.
Au nord, le Territoire d’Ango partage 182 km de frontière avec la République Centrafricaine où il n’y a pas suffisamment de services de l’Etat Congolais pour le contrôle des mouvements migratoire.
Cette situation de frontière ouverte, prédispose le Territoire d’Ango à l’insécurité quand on sait que les groupuscules de la LRA sont en train d’errer dans les larges espaces inhabités ou sous-peuplés comprises entre la RDC, le Soudan du sud et la RCA. On sait également que des braconniers étrangers s’infiltrent par cette même frontière pour tuer les éléphants et emporter des ivoires. En outre, selon les informations recueillies dans le milieu, les éléments de la LRA auraient établi leur base au de- là de Sukadi, proche de la source de la rivière Api, en collectivité Sasa. Les 3 incidents du 16 janvier 2013 entre Gwane et Digba, font penser à plus d’un observateur que les éléments de la LRA seraient revenus à leur base précitée, base se trouvant au de -là de Sukadi. Et, suite à la saison sèche qui s’installe avec étiage des ruisseaux et rivières, les éléments de la LRA trouvent des facilités maintenant pour leurs mouvements et plus d’une personne craint augmentation de leurs exactions contre les civils qui du reste sont très mal protégés.
Depuis le 22 janvier au soir, des officiers des FARDC sont arrivés à Ango dans le cadre de redéploiement de l’armée gouvernementale. Ce retour des FARDC redonne un peu d’espoir à la population locale, mais le doute subsiste quand on sait que les soldats sont peu équipés, mal payés, peu disciplinés et sans logistique (communication et moyen de déplacement) pour des actions urgentes et appropriées. On se rappellera qu’à l’absence des militaires FARDC partis pour la formation de régiment, le nombre d’incidents sécuritaires avait nettement baissé ; faisant peser le soupçon sur ces militaires sensés protéger les personnes et leurs biens ainsi que l’intégrité territoriale.
L’axe Ango-Zapay (dernier village congolais faisant frontière avec la République Centrafricaine), long de 180 km, présente aussi des défaillances sur le plan sécuritaire et de défense d’intégrité du territoire.
La présence des éleveurs nomades « Mbororo» entrés illégalement sur le territoire congolais avec leurs bêtes constitue un sujet d’inquiétude. Au fait, dans une certaine proportion, ces bêtes dévastent les champs des paysans, souillent les sources d’eau potables et provoquent la réduction des mouvements des populations en forêts d’où ils tirent les moyens de leur subsistance (pêche, chasse et cueillette). Cela fait que la tension entre ces deux communautés monte d’un cran. De ce qui précède et pour question de subsistance, la population locale développe une antipathie à l’encontre de la présence Mbororo sur le territoire d’Ango.
- Les conséquences a. Tueries, exactions diverses sur la population civile, enlèvements, violences sexuelles, violations de droits de l’homme et de droit international humanitaire, suite à la présence des éléments de a LRA et des hommes en armes non identifiés ;
b. Mouvements des populations locales (personnes déplacées internes, des retournés, des réfugiés en RCA) accompagnés de la vulnérabilité sans cesse grandissante ;
c. Destruction ou dégradation des infrastructures sociales (écoles, infrastructures sanitaires,…) et économiques (marchés et les AGR) avec comme corollaire la paupérisation des vulnérables suite à une conjoncture déjà fragile ;
d. Tracasseries diverses (policières, militaires et administratives) sur l’ensemble de la population, y compris les Mbororo.
e. Développement de l’antipathie de la population locale vis-à-vis de la présence Mbororo, des humanitaires et de la communauté internationale avec risque de l’éclatement des actes de violences.
Pour restaurer un climat de confiance et la sécurité, les recommandations suivantes sont formulées :
- Recommandations a. Pour le gouvernement - Restaurer la sécurité sur toute l’étendue du territoire national en général et du Bas Uélé en particulier.
Par la politique de grands travaux (de grandes sociétés multinationales avec des activités agricoles ou autres), favoriser l’occupation de l’espace vide entre la partie nord d’Ango et la RCA. Ensuite, installer les services de l’Etat congolais à la frontière entre la RDC et la RCA.
Définir clairement la position de l’Etat congolais face à la question des Mbororo, avec des mesures d’accompagnement pour apaiser et rassurer la population locale.
b. A la communauté humanitaire - Continuer le monitoring de la situation sur terrain et y apporter les réponses nécessaires dans la transparence.
c. A la communauté internationale - Appuyer le gouvernement congolais dans ses efforts de rétablissement de la paix et de la sécurité sur tout le territoire national.
- Plaider pour une issue pacifique au problème des Mbororo.
† Etienne UNG’EYOWUN Evêque de Bondo »